Construit au 19e siècle en bordure de la rivière Isle, le Moulin de Porchères est un fleuron du patrimoine meunier français. D’abord moulin à meules puis transformé en minoterie à cylindres dans les années 30, cet édifice, inscrit au titre des monuments historiques, rayonne aujourd’hui grâce à l’association « Vivons avec le Moulin de Porchères », présidée par le maire du village, David Redon.
La troisième étape de notre périple en Grand Libournais nous conduit à Porchères. À l’entrée du village, en bordure de la rivière Isle, se dresse un imposant édifice : le Moulin de Porchères. Nous rejoignons David Redon, président de l’association « Vivons avec le Moulin de Porchères » et maire du village, qui sera notre guide le temps d’une visite dans ce lieu chargé d’histoire.
Une histoire de famille
C’est en 1847 que Louis-Philippe, roi des France, autorise Charles Frouin à construire le Moulin de Porchères sur la rivière Isle en utilisant le barrage de navigation déjà existant. La grande bâtisse en pierre de taille est achevée en 1850 et est utilisée pour produire de la farine grâce à la force hydraulique de la rivière : « Il a une première vie avec des meules : quatre puis six puis huit paires de meule pour produire de la farine de blé. », raconte David.
Il y a trois générations de la famille Barrau qui vont se succéder et marquer de leur empreinte ce lieu au fil du 20e siècle.
David REDON, président de l’association « Vivons avec le Moulin de Porchères »
Suite au décès de Charles Frouin, le moulin est mis aux enchères en 1903 et est racheté par Louis Barrau, négociant en grains et farines à Tarbes, qui vient s’installer dans le village de Porchères. Débute alors une série de modernisation du bâtiment par la famille Barrau : « Il y a trois générations de la famille Barrau qui vont se succéder et marquer de leur empreinte ce lieu au fil du 20e siècle », explique David. Dès 1910, le moulin est muni d’une génératrice d’électricité : « Elle a alimenté le secteur en électricité bien avant le reste du territoire alentour ! »
En 1937, Paul Barrau, fils de Louis Barrau, va supprimer les meules existantes pour les remplacer par un ensemble imposant d’appareils de minoterie à cylindre, une technique moderne de production de farine venue d’Hongrie : « Des cylindres en métal vont écraser les grains de blés, puis, ce qui vient d’être écrasé va passer dans les tamis. Le processus va se répéter en fonction de la grosseur des grains jusqu’à l’obtention de la farine. », explique David. Cet investissement est réalisé suite à une décision du Front Populaire qui décrète en 1936 « le contingentement des moulins ». Pour réguler la circulation et les prix du blé et de la farine (et donc du pain !) dans toute la France, l’État a attribué à chaque moulin une quantité de blé à écraser annuellement en garantissant l’activité.
En 1954, Pierre Barrau, troisième génération, apporte sa pierre à l’édifice et crée sa marque d’aliments pour le bétail « Aliments Barrau », à partir des « déchets » issus des moutures. Le moulin va produire de la farine jusqu’en 2002 puis être vendu à un promoteur immobilier, Norbert Fradin, en 2006. C’est alors que commence un travail de réhabilitation et de valorisation du lieu à l’initiative de l’association « Vivons avec le Moulin de Porchères ».
Sauvegarder le patrimoine meunier
Le moulin de Porchères est inscrit au titre des monument historiques depuis 2007. Il se trouve au coeur d’un espace naturel protégé, labellisé Natura 2000 et « réserve Man et Biosphère » (UNESCO) : « On a la chance d’être dans le bassin de la rivière Dordogne avec une biodiversité particulièrement riche et un bon équilibre entre la nature et les activités humaines. », explique David. La volonté de l’association « Vivons avec le Moulin de Porchères » est de faire de ce moulin un musée vivant, lieu de pédagogie. Et transformer un site industriel en lieu touristique ne fût pas un long fleuve tranquille !
Le moulin n’est pas dans le bourg, c’est resté pendant longtemps un lieu un peu mystérieux. Ça a été un long travail de persuasion pour que les habitants du village se l’approprient.
David REDON, président de l’association « Vivons avec le Moulin de Porchères »
Il a d’abord fallu convaincre le propriétaire des lieux de mettre à disposition le site gratuitement et de l’ouvrir au public. Il a fallu aussi créer un lien intime entre la population locale et le moulin : « Le moulin n’est pas dans le bourg, c’est resté pendant longtemps un lieu un peu mystérieux. Ça a été un long travail de persuasion pour que les habitants du village se l’approprient. », se souvient David.
Aujourd’hui, le Moulin de Porchères est devenu un site touristique qui accueille chaque année plusieurs milliers de visiteurs. Habitants, écoliers et amoureux du patrimoine découvrent ce fleuron de l’industrie meunière et ses machines qui ont traversé les époques. En plus des visites guidées, de nombreuses activités sont proposées sur place comme des ateliers « Fabrique ton pain », le restaurant la Guinguette du Moulin, un boutique de produits régionaux ou encore des activités nautiques sur l’Isle. David conclut la visite en nous confiant un rêve : « Pouvoir à nouveau estampiller des sacs « Moulin de Porchères » et fabriquer de la farine ici, ça me semble porteur de sens ». Du grain à moudre pour les prochaines années !