Perché sur les hauteurs d’un petit village champenois, le Moulin de Dosches est la reproduction à l’identique d’un moulin sur pivot, semblable à ceux que l’on pouvait observer par dizaines dans l’Aube au 18e siècle. Chaque jour, Grégory et Gaëlle s’attellent à donner du grain à moudre à cet ouvrage majestueux qui déploie ses ailes en harmonie avec le vent.
Après avoir quitté la ville de Troyes, je poursuis mon périple à vélo dans le département de l’Aube en empruntant la voie verte des grands lacs. L’itinéraire cyclable traverse le Parc Naturel Régional de la Forêt d’Orient qui se distingue notamment par ses magnifiques plans d’eau : le Lac Amance, le Lac du Temple et le Lac d’Orient. J’ai rendez-vous non loin d’ici au moulin de Dosches, perché sur les hauteurs du petit village champenois de Dosches.
Je suis meunier, je suis un peu boulanger, je suis un peu agent d’entretien, je suis beaucoup guide. C’est un endroit que l’on gère à deux, nous devons donc avoir plusieurs casquettes.
Grégory BEUDOT, MEUNIER ET GÉRANT DU MOULIN DE DOSCHES
À l’approche du village, impossible de rater le moulin à vent qui se dresse majestueusement devant vous. L’accès au site se mérite, d’autant plus à vélo car il vous faudra franchir une pente abrupte. Mais quelle récompense à l’arrivée : un ouvrage et un point de vue exceptionnels. Je rejoins Grégory, le meunier et gérant du site qui vient de finaliser une visite scolaire : « Je suis meunier, je suis un peu boulanger, je suis un peu agent d’entretien, je suis beaucoup guide. C’est un endroit que l’on gère à deux, nous devons donc avoir plusieurs casquettes », commence-t-il. Contrairement à ce que raconte la comptine pour enfant, le meunier n’a pas beaucoup le temps de dormir !
Charpentier et aubois d’origine, Grégory a d’abord participé à la construction de ce moulin typique entre 2004 et 2006 avant de partir à l’étranger. Il revient dans l’Aube quelques années plus tard « un retour aux sources » pour s’occuper de l’entretien du site. De fil en aiguille, il en devient le gérant et meunier avec sa femme Gaëlle : « Je ne pourrai pas dire que j’ai toujours été attiré par la meunerie mais je me suis pris au jeu et maintenant c’est devenu une véritable passion. », explique-t-il.
Un moulin sur pivot
Sa passion pour le patrimoine et les moulins, Grégory la partage avec Erwin Schriever, ancien compagnon charpentier à l’initiative de cette idée folle du Moulin de Dosches. Son objectif : reconstruire à l’identique un ouvrage que l’on observait par dizaines dans l’Aube au 18e siècle. « Petit, Erwen allait visiter des moulins avec son père, c’était un peu un rêve de gosse », raconte Grégory. Après un énorme travail sur archives, la construction débute en 2004 sous l’égide de l’Association des Moulins à vent Champenois et à partir des plans d’autrefois.
On savait qu’il y avait un moulin à Dosches, c’était donc tout naturel de l’implanter ici.
GRÉGORY BEUDOT, MEUNIER ET GÉRANT DU MOULIN DE DOSCHES
Le Moulin de Dosches est un moulin sur pivot entièrement en bois. Cela signifie qu’il peut être pivoté manuellement pour l’orienter face au vent : « Nous avons une structure qui fait 27 tonnes qui tourne sur un pivot qui en fait 7 ». Rendez-vous compte, deux personnes suffisent pour déplacer ce mastodonte ! Le corps du moulin est parallélépipédique et repose sur une base maçonnée. Le moulin sur pivot se distingue du moulin-tour, généralement en pierre, dont seule la toiture conique est orientable.
Quant au site d’implantation, il n’a pas été choisi par hasard. « On savait qu’il y avait un moulin à Dosches, c’était donc tout naturel de l’implanter ici. », explique Grégory. Avec le soutien d’une ancienne mairesse, un site est identifié en surplomb du village avec une bonne prise au vent et un magnifique panorama sur la forêt d’Orient.
Donner du grain à moudre
Le Moulin de Dosches n’est pas qu’une oeuvre architecturale. Comme ses prédécesseurs, le moulin fabrique de la farine à partir de blé local : « On achète le blé à 15 kilomètres d’ici chez des agriculteurs qui font des variétés de blés anciens et modernes en agriculture biologique », explique Grégory.
Concrètement, les ailes du moulin vont entrainer la rotation d’une meule horizontale mobile sur une meule fixe. Ce mouvement de rotation provoque des à-coups sur une trémie qui alimente régulièrement les meules en grain. La farine moulue s’écoule par une autre trémie vers l’étage inférieur où elle est mise en sac.
Nous ne sommes pas producteurs de farine. Notre vocation première c’est de préserver le patrimoine et le savoir-faire.
GRÉGORY BEUDOT, MEUNIER ET GÉRANT DU MOULIN DE DOSCHES
Toutefois, la quantité de farine produite au Moulin de Dosches est modeste en comparaison à une production industrielle : « Nous ne sommes pas producteurs de farine. Notre vocation première c’est de préserver le patrimoine et le savoir-faire. »
À cela s’ajoute d’autres activités comme le jardin extérieur, des atelier de fabrication de pain, des jeux en bois pour former un ensemble cohérent et harmonieux. Chaque année, le Moulin de Dosches accueille plusieurs milliers de visiteurs dont beaucoup d’enfants : « On pense que la transmission du patrimoine se fait par les enfants ». Et le couple ne compte pas s’arrêter là : « Je rêverai de construire à côté de ce moulin un moulin-tour. », conclut Grégory. Souhaitons-leur bon vent !